La Passion selon Saint-Matthieu

Samedi soir, j'ai vécu un grand moment : la Passion selon Saint-Matthieu de Bach, au Théâtre des Champs Elysées à Paris.
Je le sais maintenant : il faut avoir entendu ça au moins une fois dans sa vie... et de cette façon-là !
L'Orchestre National de France, la Maîtrise et les hommes du Choeur de Radio-France, direction : Kurt Masur.

Je ne saurai parler que de l'émotion qui m'a saisie trois heures durant... mais quelle émotion ! Quand je dis saisie, le mot est faible... totalement envahie !
Peut-être juste quelques premières minutes l'esprit distrait, le temps de m'habituer à l'accoustique sans réverbération du théâtre (du moins à l'endroit où j'étais placée), et de me caler dans mon fauteuil peu confortable... mais très vite je me suis trouvée emportée "à l'intérieur" de la Passion, tant l'interprétation était magnifique.
Un évangéliste inspiré qui semblait me raconter "l'histoire" à moi... entouré de superbes voix.
Je me suis sentie tellement immergée dans ce drame que j'en ai regretté l'entracte qui m'obligeait à en sortir.
Et alors, la fin de ce chef d'oeuvre !!! presqu'irracontable... le Christ meurt... et cette mort amène un petit miracle dans le théâtre : plus un seul tousseur, plus de pages de programmes bruyamment tournées, de fauteuils qui grincent, de voisine qui m'oblige à me lever pour la laisser sortir, en plein milieu d'un sublime duo flûte/ soprano à la voix d'ange...
Un grand silence... un long frisson qui parcourt la scène et le public... quelques secondes d'une émotion extrême et partagée, accrochée à la main restée suspendue de K. Masur !... puis ce choral plusieurs fois entendu, qui reprend alors très lentement dans un piano si bouleversant qu'on retient son souffle !
Et que dire enfin du dernier et célèbre choeur de l'assemblée pleurant devant le tombeau du Christ ?... Ah là là !!!...

Oui, trois heures de grâce...


Toujours "extraordinaire" à mon avis, cette soixantaine de très jeunes et frais minois de jeunes filles pour la plupart (certaines vrais petits "bouchons" de 11/12 ans, à peine plus grosses que leur épaisse partition !) gardant la même concentration et la même énergie de la 1ère à la 182ème minute !... (je n'arrive pas à écrire moins de 182 sinon j'ai plein de souriards indésirables !!!)
Comme dirait à peu près Jauvrys : qu'elle est belle c'te jeunesse !!!

ah Véga... suis toute heureuse pour toi. J'imagine bien ton enthousiasme. Cette passion est tellement belle.

plus modestement, l'occasion s'y pretait, nous nous sommes aussi fait un plaisir immense mais "at home" avec les Cantates de Pâques (JSB donc) par Harnoncourt et Leonhardt. Superbe moment.

Dj Drabmol a écrit:

ah Véga... suis toute heureuse pour toi. J'imagine bien ton enthousiasme. Cette passion est tellement belle.

plus modestement, l'occasion s'y pretait, nous nous sommes aussi fait un plaisir immense mais "at home" avec les Cantates de Pâques (JSB donc) par Harnoncourt et Leonhardt. Superbe moment.

Merci pour tes gentilles pensées ! Oui, Bach c'est Bach... n'est-ce pas ?...

et oui... Bach, c'est Bach ! et c'est subliiiiiiiiiiiiiiime !

Et comme disait (a-peu-près) l'autre...Dieu peut remercier Bach qui contribue tant à faire croire en lui..

Jauvrys a écrit:

J'ai lu et entendu des personnes crier leurs grands dieux qu'elles ne mettraient pas les pieds au TCE pour une telle œuvre, qu'il aurait mieux valu l'église X etc...

Oui... je suis d'accord et je n'aime pas non plus particulièrement l'accoustique ni l'inconfort, il faut bien le dire, du TCE. C'est pourquoi il m'a fallu un temps d'adaptation avant de ne plus trop penser à ces inconvénients... mais certaines églises parisiennes ne sont guère plus adaptées même à ce genre d'oeuvre à mon avis, et pourtant, quand il s'y passe des choses exceptionnelles, j'y vais quand même !
Je pense à la Madeleine, à la Trinité et même parfois à St Roch... Tout le monde n'a pas la chance d'avoir Vézelay ou Sylvacane, n'est-ce pas ?....

Point de vue installation, on n'est effectivement guère mieux sur une chaise en paille dans une église que sur un fauteuil du théâtre des champs Elysées. Surtout si on mesure plus de 1m70... (je ne parle même pas de ceux qui mesurent plus de 1m80).

Petula a écrit:

Point de vue installation, on n'est effectivement guère mieux sur une chaise en paille dans une église que sur un fauteuil du théâtre des champs Elysées. Surtout si on mesure plus de 1m70... (je ne parle même pas de ceux qui mesurent plus de 1m80).

Tu as raison, Petula, même avec mon petit 1m58, j'avais presque les genoux contre le fauteuil de devant !!! mais comme le dit Jauvrys, il arrive très vite un moment où l'on n'y pense plus... même au TCE !

Eh bien moi, au TCE, j'y vais fin avril pour écouter Copland (que je ne connaît que de nom), Khatchaturian et Chostakovitch (en produit d'appel).

Yutaka Sado, inconnu au bataillon (mon bataillon n'étant pas très grand, entre nous soit dit), dirige l'orchestre national de France, Julian Bliss à la clarinette.

Ceci dit, j'y ai vu souvent Kurt Masur, jamais sur de la musique baroque, qui n'est pas très souvent jouée au TCE.
J'y ai entendu une très étrange interprétation de la symphonie n°3 de Brahms. Tellement étrange que je m'en souviens encore...

a écrit:

Yutaka Sado, inconnu au bataillon

RE-MAR-QUABLE : tu devrais te régaler. Il a été récemment nommé chef permanent de... de... ? ? je ne sais plus... mais deux orchestres très bien je suis nuuul, quand même !

Citation :

J'y ai entendu une très étrange interprétation de la symphonie n°3 de Brahms. Tellement étrange que je m'en souviens encore...

Et si tu nous en disait plus ?

Yukata Sado a beaucoup travaillé avec Bernstein, il est absolument génial, tu devrais donc te régaler. Lorsqu'il dirige (tout comme Bernstein), il dégage une joie de vivre extraordinaire, une énergie incroyable. Tu ne vas pas le quitter des yeux un seul instant à croire que les musiciens passent au second plan.... Cela fait plusieurs années qu'il dirige l'orchestre national de France. Un beau concert en perspective !

Et bien... C'est difficile à expliquer. D'abord parce que ça fait un bout de temps, et que je ne me souviens que de cette impression d'étrangeté sans trop savoir pourquoi.

C'était assez impressionniste. Nous étions dans une loge de face et devant nous, il y avait un couple qui a discuté pendant une bonne partie de la symphonie : Monsieur (connaisseur) essayait d'impressioner Madame (novice) avec ses connaissances sur je ne sais trop quel instrument (un cor ?) qui jouait soit-disant merveilleusement bien, tellement merveilleusement bien qu'il était nécessaire de parler pendant qu'il jouait...

A côté de ça, le plus étrange, c'était l'emploi des nuances. Globalement, c'était assez ressemblant à ce qui se fait d'habitude, mais dans le détail, parfois, c'était carrément l'inverse (là où j'avais l'habitude d'entendre un crescendo, il y avait un decrescendo). Disons qu'on sentait que tout avait été vraiment travaillé en profondeur, à partir de la partition, en essayant de prendre de la distance avec ce qui avait déjà été fait. Ce n'est pas si courant que ça finalement quand j'y réflechis. Et ça donnait un résultat doux, ample, moins acide dans certains passages que les autres interprétations que je connaissais (surtout sur le quatrième mouvement, celle de Karajan étant celle que j'avais le plus entendu avant).

Ca m'a peut-être marqué aussi parce que, en voyant la différence entre cette interprétation et les autres (j'ai entendu cette symphonie une fois à Radio France, avant cette fois-là, mais ça ne m'avait pas autant marqué), ce jour-là, j'ai un peu mieux compris à quoi pouvait bien servir un chef d'orchestre.

Astarté a écrit:

Yukata Sado a beaucoup travaillé avec Bernstein, il est absolument génial, tu devrais donc te régaler. Lorsqu'il dirige (tout comme Bernstein), il dégage une joie de vivre extraordinaire, une énergie incroyable. Tu ne vas pas le quitter des yeux un seul instant à croire que les musiciens passent au second plan.... Cela fait plusieurs années qu'il dirige l'orchestre national de France. Un beau concert en perspective !

Ah oui ? Je ne suis pas très au fait de l'actualité musicale...